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				Lockerbie : et si la Libye était innocente... 
				 
				Le 14 septembre 2007  
				
				La 
				justice écossaise va bientôt fixer la date du procès en appel de 
				celui qu'elle avait condamné à perpétuité pour la mort de 
				270 personnes dans l'explosion d'un Boeing de la Pan Am.
				 
				LA LIBYE 
				est-elle innocente de l'un des pires attentats terroristes du XXe siècle ? 
				La justice écossaise sème le doute. Elle devrait fixer avant fin 
				septembre la date du procès en appel d'Abdelbasset al-Megrahi. 
				Ce haut responsable des services secrets libyens a été condamné 
				à perpétuité en 2001 pour avoir placé une bombe dans le vol 103 
				de la Pan Am, le 21 décembre 1988. L'explosion du Boeing 747 
				au-dessus de la petite ville écossaise de Lockerbie fit 
				270 morts, dont onze au sol. Après de longues négociations, 
				Tripoli avait accepté de livrer Megrahi, tout en clamant son 
				innocence. Depuis, le colonel Kadhafi ne cesse de réclamer son 
				retour.
				 
				
				Le 28 juillet, après trois ans d'enquête, la commission de 
				révision écossaise a accordé à Megrahi le droit à un nouveau 
				procès, citant la « possibilité d'une erreur judiciaire ».
				Un premier appel avait échoué en 2002. Mais cette fois, le 
				rapport de 800 pages de la commission laisse entrevoir une issue 
				différente. 
				
				L'enquête détruit l'une des principales preuves à charge. Selon 
				l'accusation, Megrahi avait posé la bombe, une radiocassette 
				Toshiba bourrée de semtex, un explosif militaire, dans une 
				valise qu'il avait enregistrée à Malte. Le seul lien tangible 
				entre le Libyen et la bombe, selon le procès de 2001, est un 
				fragment de vêtement enroulé autour d'un morceau du minuteur 
				électronique de la bombe. Ce vêtement, une chemise de marque 
				Slalom, avait permis aux enquêteurs de remonter jusqu'à une 
				boutique maltaise. Son patron, Tony Gauci, avait reconnu en 
				Abdelbasset al-Megrahi l'homme qui lui avait acheté cette 
				chemise. Son témoignage a été démoli : Megrahi ne pouvait pas 
				avoir été présent à Malte ce jour-là, et Tony Gauci, dont les 
				déclarations avaient changé plusieurs fois, avait déjà vu sa 
				photo dans un magazine avant de le reconnaître parmi plusieurs 
				figurants. 
				
				Mais les juges n'ont pas franchi l'étape suivante : la remise en 
				cause de la présence du fragment de minuteur lui-même. La 
				commission de révision n'a « trouvé aucune raison de conclure 
				que des preuves ont été fabriquées par la police, l'accusation, 
				les experts scientifiques, ni tout autre corps officiel ». 
				La thèse du trucage est soutenue par l'avocat de Megrahi, 
				accompagné par un groupe de pression informel qui comprend des 
				juristes, le père de l'une des victimes (voir ci-dessous), 
				l'ancien agent de la CIA devenu écrivain Robert Baer, ou le 
				docteur Hans Köchler, observateur officiel de l'ONU au procès de 
				2001. Ce dernier a trouvé « étrange » le refus de la cour 
				d'examiner une éventuelle manipulation. Selon les 
				révisionnistes, le fragment de minuteur ainsi que les morceaux 
				de vêtements auraient été « plantés » par la police écossaise ou 
				par la CIA, présente officiellement sur les lieux du crash. 
				Edwin Bollier, le président de Mebo, la firme suisse qui avait 
				fabriqué le minuteur, a toujours affirmé que le fragment 
				présenté par la police avait plusieurs fois changé de forme et 
				de couleur. 
				
				Les militants de la théorie du complot ont reçu récemment un 
				renfort inespéré. Fin juillet, un homme a déposé spontanément 
				devant la police suisse, déclarant vouloir soulager sa 
				conscience. Sous serment, Ulrich Lumpert, ingénieur en 
				électronique chez Mebo au moment des faits et témoin numéro 550 
				au procès de 2000 à 2001, a affirmé avoir volé un minuteur et 
				l'avoir remis directement à un policier écossais pendant 
				l'enquête. La déposition d'Ulrich Lumpert remplit la case 
				laissée vide par la commission de révision. Elle pèsera lourd 
				dans les débats de la cour d'appel. 
				« Une 
				pluie de sang » 
				
				Ce coup de théâtre de dernière minute pose naturellement bien 
				des questions. La décision de la commission de révision et les 
				remords tardifs de l'ingénieur se sont produits moins d'un mois 
				avant ou après la libération des infirmières bulgares. Et ont 
				suivi de peu la signature entre Tony Blair et le colonel 
				Kadhafi, fin mai, d'un mémorandum sur l'extradition de 
				prisonniers qui « ne concernait pas spécifiquement Megrahi », 
				pourtant seul détenu libyen du Royaume-Uni. Le retour au pays du 
				prisonnier de Glasgow couronnerait la réhabilitation de la 
				Libye, négociée par Washington et Londres. 
				
				Quoi qu'il en soit, les perdants sont déjà connus : la justice 
				et la vérité. Les militants de l'innocence de la Libye affirment 
				que le tribunal de 2001 a été instrumentalisé pour détourner les 
				soupçons du vrai coupable, le FPLP-commandement général, 
				groupuscule palestinien hébergé à Damas et travaillant pour la 
				Syrie et l'Iran. Des éléments matériels précis avaient d'abord 
				dirigé l'enquête vers le FPLP-CG. Téhéran avait un mobile. 
				L'ayatollah Khomeiny avait promis « une pluie de sang » 
				en représailles de la destruction en vol d'un Airbus d'Iran Air 
				et de ses 290 occupants, abattus par un navire de guerre 
				américain cinq mois plus tôt. 
				
				Mais les enquêteurs ont brusquement changé leur fusil d'épaule. 
				Pour les défenseurs de la Libye, l'ordre venait d'en haut. 
				Saddam Hussein avait envahi le Koweït, et la coalition 
				occidentale avait absolument besoin de la participation de la 
				Syrie dans la coalition, ainsi que de la bienveillance de 
				l'Iran. La Libye avait, elle aussi, des comptes à régler. Le 
				bombardement américain de 1986 sur Tripoli avait tué la fille 
				adoptive de Kadhafi. Le procès de 2001, entaché d'erreurs et de 
				facilités, a laissé peu de place à un véritable travail 
				judiciaire. L'enquête sur le drame de Lockerbie reste à mener. | 
			
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				11 
				octobre 2007 
				
				Au cours de l'audience préliminaire du procès en appel des deux 
				haut responsable du renseignement libyen condamnés à la prison à 
				vie, l'accusation va peut-être pouvoir communiquer un document 
				secret qu'elle détient qui pourrait innocenter la Lybie. 
				
				Mais la Commission de révision écossaise a refusé jusqu'ici de 
				divulguer ce document, le déclarant « secret ». Qu'y 
				a-t-il donc de si sensible dans ce dossier, dix-neuf ans après 
				les faits ? 
				
				Il pourrait concerner le minuteur de la bombe, dont un fragment 
				a été retrouvé dans les débris de l'avion. L'ingénieur suisse 
				qui l'a fabriquée, témoin en 2001, a récemment affirmé qu'il 
				l'avait remise directement « à une personne liée à l'enquête », 
				et qu'elle ne s'était donc pas trouvée dans l'avion.  
				
				Le fameux document secret ferait référence à la possession par 
				l'agence américaine de minuteurs du même type à l'époque des 
				faits.  
				
				Mais d’après le représentant de l’accusation, « Le 
				document ne provient pas du gouvernement des États-Unis ». 
				Mais alors « Si ce n'est pas la CIA, qui ? », 
				s'interroge un spectateur, le Dr Jim Swire, qui a 
				perdu sa fille dans l'attentat. |